Le chemin au bord du lac : un pas en avant, deux pas en arrière ?
Au conseil du 22 mars 2023, la Municipalité de La Tour-de-Peilz a annoncé que la Cour de droit administratif et public (CDAP) avait constaté des problèmes de forme dans la procédure du chemin qu’il s’agissait de corriger, et que seules restaient à traiter les questions de fond. L’association des rives du lac s’est alors réjouie du pas en avant que semblait représenter cette décision judiciaire.
Quelques jours plus tard, le « 24 heures » titrait toutefois son article ainsi : « Les opposants au sentier lacustre ont eu gain de cause » et pointait du doigt des manquements et couacs dans la procédure. Alors, qu’en est-il vraiment ? L’association des rives du lac s’est penchée sur l’arrêt de la CDAP du 14 mars 2023. On y découvre que le canton et son administration (en l’occurrence la Direction générale de la mobilité et des routes), mais aussi la commune et sa Municipalité, n’ont pas respecté la procédure, ceci de manière tellement grave que la CDAP n’a pas eu d’autre solution que de constater que les décisions rendues par ces autorités étaient nulles.
La CDAP a en conséquence annulé la décision du 21 février 2022 du Département des infrastructures et des ressources humaines approuvant le projet de chemin et retourné le dossier à cette autorité pour nouvelle décision. Cela signifie que les propriétaires riverains ont gagné leur recours, sur la forme uniquement, et qu’une partie de la procédure est à recommencer. Les propriétaires pourront ensuite à nouveau déposer des recours sur le fond.
Les erreurs « graves » qui ont été commises par la commune et le canton peuvent se résumer ainsi :
- Par décisions du 16 décembre 2021 adressées aux recourants, la Municipalité a indiqué lever les oppositions au nom du Département cantonal concerné. Or, la Municipalité n’était pas compétente pour se prononcer elle-même sur les oppositions et encore moins pour agir au nom du Département cantonal. Les décisions communales sur opposition devaient en effet être rendues par le Conseil communal. La CDAP a donc jugé que lesdites décisions émanaient d’une autorité incompétente et étaient par conséquent nulles.
- Le 21 février 2022, le Département des infrastructures et des ressources humaines a approuvé le projet de chemin sur la base d’un dossier incomplet (il y manquait en particulier le Complément au Préavis municipal n° 1/2021). Dans le but de corriger cette erreur, la Direction générale de la mobilité et des routes a décidé de rendre elle-même, le 18 juillet 2022, de nouvelles décisions. Elle n’aurait toutefois pas dû procéder ainsi, car elle ne bénéficiait d’aucune délégation de compétence de la part du Département des infrastructures et des ressources humaines. La CDAP a donc jugé que lesdites décisions émanaient d’une autorité incompétente et étaient par conséquent nulles.
Il est particulièrement choquant de constater une telle accumulation d’erreurs procédurales dans ce dossier. Cela amène l’association des rives du lac à poser les questions suivantes :
La Municipalité avait-elle pris la précaution de demander un avis de droit rigoureux auprès de son bureau d’avocats, dont les compétences en droit public ne manquent pas ? Comment se fait-il que l’administration cantonale n’ait pas réalisé qu’un document important manquait à son dossier ou qu’il fallait une délégation de compétence pour permettre à la Direction générale de la mobilité et des routes de rendre les décisions du 18 juillet 2022? Quelles précautions et mesures le canton a-t-il pris pour s’assurer de la stricte légalité de sa démarche dans ce dossier, alors qu’il savait pertinemment que les propriétaires s’opposant au projet de chemin avaient la ferme intention d’aller jusqu’au Tribunal fédéral et que la procédure serait passée au peigne fin ?
Toutes ces négligences auront fait perdre plus d’un an dans ce dossier. La volonté populaire exprimée par la votation de novembre 2010 est à nouveau bafouée. L’association des rives du lac espère qu’à l’avenir la commune et le canton redoubleront de prudence et éviteront tout nouvel écueil. Pour notre part, nous allons tout faire pour maintenir notre cap et suivre de près le processus jusqu’à la réalisation du chemin pédestre au bord de notre beau lac.